[PV] ' L'essence des ténébres '

C'était tout. La femme au rictus très prononcé avait prit la feuille ou plutôt l'avait arraché de ses mains. Assez violemment d'ailleurs et ne l'avait qu'à peine regardé. Et... c'était tout. Shelley resta un moment sans bouger, dans l'incapacité à cet instant même de parler ni même de penser. Un silence, le silence... lourd et obsessionnel qui l'anéantissait à chaque fois. Un silence comme elle ne les aimait pas. Pas celui qu'elle connaissait et qui la consolait de certains tourments non, celui là était tellement vide de...

*De ce que tu espérais ? Et tu espérais quoi ?*

L'autre. L'autre absence de bruit... celui qui la libérait de toutes ses paniques qu'elle connaissait si bien et celui qu'elle ne désirait pas, commençait à monter inéluctablement en elle, lui faisant goûter de nouveau aux vertiges qu'elle ne pourrait refouler... Oh ! Comme Shelley aurait aimé que la femme lui parle. Juste un peu.
Seulement une petite fois. Elle aurait aimé qu'elle lui vienne en aide mais elle resta dans le silence absolu. Aucun sons ne sortit de sa bouche...

Une porte, une autre. Sûrement comme toutes celles qu'elle devrait rencontrer et pousser... Quelle différence ? Shelley était loin de pouvoir les regarder et de voir à quoi elles ressemblaient. Son œil perdu dans le vague, elle avançait... Un Bruit. Celui de la porte qui se refermait derrière elle et... le noir ou si peu de lumière. Si Shelley avait pu voir la pièce éclairée, elle l'aurait vu suffisamment grande pour ne pas étouffer. Sa respiration se bloqua soudain et elle se tordit en deux. Les bras repliés sur son estomac, elle chercha sa respiration... vainement. Sensation de vertige, accélération de son rythme cardiaque, transpiration, secousses musculaires, autant de maux qui se répétaient de nouveau, la laissant pétrifiée. Son cerveau ne fonctionnait plus. Seul l'instinct de survit lui indiquait la recherche d'un remède qui la sortirait de cette impasse.

Elle ne vit que le dessin, des milliers de dessins comme des arcs brisés , en forme de cintre, de... Des fenêtres qui en contenaient des milliers. Son œil essayait de voir mais il devait lui jouer le tour du : je vois double tant la concentration est intense. Elle s'en approcha du mieux qu'elle put, se dressant sur ses petits pieds, les mains maintenant plaquées contre le mur froid d'où se dégageait une odeur loin d'être agréable. Encore cette odeur de brûlé. Encore cette sensation étourdissante qu'elle refoula cette fois-ci, se concentrant uniquement sur le fait qu'il lui fallait respirer coûte que coûte par les petites nervures mais, rien n'y fit. L'envie lui prit alors de s'échapper de cet endroit, sans avoir l'idée de retourner d'où elle était simplement venue. Cette nouvelle crise la tétanisait et s'emparait d'elle sans aucun répit, la laissant nullement réfléchir, la peur de l'inconnu...
Elle déchira d'abord les bandes qui protégeaient ses blessures, faisant saigner certaines. Voulut forcer de ses ongles battants le béton, creuser , sans bien sûr pouvoir y arriver. Sous l'effort intense, quatre de ses ongles se retournèrent et se brisèrent mais, elle n'en sentit pas la douleur.

C'est alors que le froid la posséda. Horrible sensation que celle-là, qui la fit sortir de ce cauchemar et qui s'installait dans la pièce.. Shelley reprenait peu à peu ses sens mais une autre peur la soumettait à son environnement. Elle se retourna brusquement, haletante et chercha autour d'elle. Inutile d'essayer de voir, il faisait si sombre... Shelley tendit la main pour chercher à tâtons ce qui pouvait lui donner cette impression si étonnante : celle de ressentir comme une présence. Un sentiment d'être observée et de ne plus être seule, développait de nouveau chez elle, un incroyable pouvoir d'inquiétude ressentie face à un nouveau danger qui l'interpellait.

*Tu as peur ?*

Tremblante, Shelley s'entendit crier :

- Non, non je ne veux pas... Je veux...

Elle sentit alors comme un souffle dans son cou :

*Pourtant tu devrais !... *

Et puis plus rien. Le froid s'arrêta aussi brusquement qu'il était apparut, laissant la pièce légèrement chaude ce qui ne faisait qu'accentuer l'odeur de pourriture qui encrassait les murs. Le souffle irrégulier qui lui harcellait la nuque avait cessé d'une manière très sèche comme si une main s'était plaquée contre la bouche d'où il provenait. Non, en fait le bruit ne cessa pas totalement. Un petit cris pleintif s'élevait d'un coin sombre, mal éclairé ou se trouvait une masse noire difforme. On aurait dit un enfant accroupit qui se plaignait en poussant des petits cris tristes et désolants. Les sons timides qui sortaient de sa gorge se collaient au mur et suivait leur ascension perpendiculaire avec le sol pour se perdre dans un plafond haut perché, voûté où l'on distinguais mal les dernières hauteurs.

Peu à peu, les yeux s'habituaient à l'ombre qui se tenait dans un coin. On pouvait maintenant distinguer une silouhaite acroupie, les bras serrés sur son ventre en se prenant les côtés. Un peu comme lorsqu'on enlace quelqu'un pour avoir du réconford. Mais là, personne, pas d'homme, pas d'amis, pas d'animaux à serrer dans ses bras, seulement l'atmosphère impalpable qui nous réconforte si peu. Comme c'est désolant de découvrir, en regardant un peu plus dans cette direction, un corps accroupit, triste (je l'ai déjà dit). Un petit garçon à la chevelure brunâtre, les épaules dénudées, qui sursautent dans un sanglots à tous les cinq secondes. Triste et pitoyable. Des traits fins se dessinnent, on y voit parfaitement des épaules, des bras, une ligne fine descendre et former les côtes. Le reste restait plus ou moins dans l'ombre.

Un dos blême, écorché, des épaules attrophiées, des bras maigres et couverts d'ématômes. Et pourtant, toujours bien conscient, sa voix s'élevait. D'un ton doux, mais froid et parsemé de sanglots.


Si forte et si douce à la fois,
je m'emnivre de ta voix.
Une parole, un seul mot de toi,
je suis toute suite hors de moi.
Si seulement il n'y avait que ça,
mais tout ton corps m'attire à toi.

Tes yeux, ta bouche et tes doigts,
se consume sur moi comme un feu de joie.
Maintenant que l'on vit sous le même toit,
tous ce que je désire ce rapporte à toi.
Que je pleurs ou que j'ai froid,
mon réconfort je le trouve dans tes bras.

Regarde ce que tu arrive à provoquer,
et dans quel état tu me mets.
Je sais que ce n'est qu'un jeu pour toi,
j'essaye mais je n'y résiste pas.
Mais je sais que malgré ça,
C'est toi mon étoile qui brille tout là-bas.

[ Pardonne moi si c'est court, un brin... ^^' ]

Instinctivement elle chassa de sa main ce qui lui sembla être une pression qu'elle sentit sur ses lèvres, juste après le souffle qu'elle avait sentit dans sa nuque, froid. Elle s'était retournée, scrutant autour d'elle cherchant la moindre silhouette mais, elle se savait seule. Seule avec cette sensation étrange et cette voix qui résonnait encore dans sa tête et dont son cerveau refusait formellement de se rappeler les mots exacts. Elle continua alors de marcher, grelottante. Pourtant le froid avait cessé et la chaleur qui y faisait place était loin d'être étouffante mais, Shelley avait toujours autant de mal à respirer. L'odeur nauséabonde qui remplissait la salle à présent rendait ses mouvements cardiaques bien plus lents et irréguliers. Son esprit actuel était loin de pouvoir associer réellement ce qui se passait. Elle avança toujours aussi incertaine de savoir ce qu'elle pourrait trouver dans cette pièce. Ses petits pieds trop fatigués de la supporter se poser l'un devant l'autre mal coordonnés. Chancelante.

Ce ne fut pas l'arrêt total de bruit qui la ramena brusquement à la raison, non. Ce fut les sanglots qui s'élevaient dans la pièce entière, par échos, distincts, précis... sanglots d'enfant.

- Julien ?

Le seul mot qu'elle put sortir de sa bouche asséchée. L'angoisse, un nouveau sentiment de malaise psychique qui la ramenait presque dix ans en arrière, une peur indescriptible de revivre le passé resté enfoui au plus profond de son inconscient : le petit Julien tremblant, les joues rosies, la tête basse. Même si elle avait été seule à faire cet acte qui la répugnait à ce moment précis, elle se savait bel et bien coupable. Vouloir oublier et ne plus se rappeler mais, les sanglots qu'elle entendait étaient bien réels et ne cessaient pas. Shelley ne bougea plus pendant un laps de temps, saisie !

Tu l'entends toi aussi ?

Elle ne laissa sortir qu'un vague son qui ne ressemblait à rien......petit cri plaintif d'une douleur extrême qui maintenant lui enserrait le cœur. Son esprit sembla se vider soudain de toutes pensées logiques, ne cumulant plus du tout le réel et l'invraisemblable...

Le regard insignifiant, elle continua pourtant d'avancer alors vers le coin, ce coin précis d'où semblait émaner une forme. Menue, toute recroquevillée et qui l'interpelait de par ses sanglots résonnant comme un écho éternel qui ne s'arrêtait plus.
Shelley plissa légèrement son œil, essayant de percevoir dans la pénombre, s'approchant de plus en plus près malgré la peur l'accablant chaque secondes passantes. Avec un effort indescriptible, elle tendit le bras comme pour venir en aide, tandis qu'elle ne pouvait ignorer les paroles entre coupées de sanglots, comme une chanson mortelle qui pénétrait irrémédiablement son cerveau.

Tu vois ce que tu as fais !

Il était là, oh !... elle ne le voyait qu'à peine mais ce qu'elle cherchait était là, comme apeuré, cherchant le réconfort et oh... comme il lui semblait tellement triste... Shelley s'arrêta nette. Elle ne voulait plus avancer, ni voirr et ne plus entendre. Secouant la tête nerveusement de gauche à droite, elle commença à reculer lentement.